Attendue avec impatience, la fin de la période de « block-out » des actions des fondateurs d’Uber, le 6 novembre dernier, a confirmé une nouvelle facette du désastre du modèle de la multinationale. Si la chute vertigineuse des actions de la licorne ne semble pas affaiblir son lobbying, en France, les chauffeurs de taxi maintiennent leurs revendications contre la concurrence déloyale qui perdure malgré les efforts des pouvoirs publics. Tandis que le Parlement reste divisé sur le projet de loi d’orientation des mobilités, les organisations professionnelles taxi travaillent, dans un souci d’équilibre économique de l’activité, à définir l’actualisation tarifaire 2020 et maintiennent leur concertation parfois tendue avec l’Assurance maladie.

Attendant la rédaction des décrets d’application de la future loi d’orientation des mobilités, les taxis veillent à l’équilibre de leur activité.
LOM de discorde
Fidèle à sa ligne, le Sénat a rejeté le projet de loi d’orientation des mobilités (LOM) en nouvelle lecture. Il a en effet adopté une motion préalable à l’examen du texte au motif que les compétences d’autorités organisatrices de la mobilité (AOM) ont été données aux communautés de communes et intercommunalités sans en prévoir le financement, d’autant que les collectivités devront investir pour mettre en place des interfaces digitales recensant les offres de mobilité disponible sur leurs territoires et permettre aux usagers de payer et réserver en ligne leurs déplacements intermodaux… La motion des sénateurs a eu pour effet le rejet du projet de loi sans débat ni examen des amendements. Bénéficiant d’une procédure accélérée, la décision du Sénat reste symbolique car, comme le prévoit la Constitution, l’Assemblée nationale aura le dernier mot. La lecture définitive de la LOM par les députés, dont le vote solennel devrait intervenir à l’issue, est annoncée pour le 19 novembre prochain.
Sur le fil du rasoir
Alors que l’actualisation 2020 des tarifs n’est pas encore finalisée, l’Assurance maladie a rappelé aux taxis parisiens conventionnés qu’ils doivent réaliser plus de 50 % de leur prise de patients sur leur zone de prise en charge, malgré la régionalisation des plateaux de soins… Elle a « invité » les patients bénéficiant pourtant d’une prescription médicale de transport d’utiliser leur voiture personnelle pour être ensuite remboursés grâce à un nouveau service en ligne… Un dispositif qui ne manque pas d’interpeller, notamment les acteurs de santé prescripteurs de ces fameux « bons de transport », source de nombreux litiges et d’impayés et qui devraient faire l’objet d’une prochaine réunion entre les représentants de la Caisse nationale d’assurance maladie et les fédérations de taxi.
Licornes sans tête
Malgré ses déboires, Uber court toujours. Dès la fin de la période de blocage boursier, son sulfureux fondateur, Travis Kalanick, a cédé 20 % de ses participations. Bien que le titre ait aujourd’hui perdu près de 50 % de sa valeur, la multinationale continue de courtiser les décideurs politiques. Son nouveau credo : améliorer la mobilité dans les zones rurales. Tout un programme qu’elle tente de faire avancer sur la scène européenne : « Plus il est facile pour quiconque de devenir un pilote Uber, plus nous sommes en mesure de fournir un service de qualité dans les zones rurales et les zones moins densément peuplées », a déclaré Pierre-Dimitri Gore-Coty, vice-président européen de la multinationale dans un communiqué de presse valorisant le développement d’Uber en Croatie, Slovaquie, Roumanie et Finlande. Espérons que la Commissaire européenne en charge du développement numérique, Margrethe Vestager, reste ferme sur ses objectifs récemment affirmés devant les députés européens pour « protéger les travailleurs des plates-formes ».
HM