Loi d’orientation sur les mobilités : Taxi numérique

Dans la liste des différentes dispositions relatives au transport public particulier de personnes figurant dans la LOM, loi sur les Mobilités, « l’accès aux données des taxis, VTC et du covoiturage » est un des sujets clefs. Le projet de généralisation du dispositif le.Taxi, « plate-forme dématérialisée de mise en relation des taxis disponibles, en service dans le ressort géographique de leur autorisation de stationnement, avec des clients », financé par l’État et géré par le secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, s’inscrit dans l’application de l’article 1er de la loi du 1er octobre 2014. Interface entre « opérateurs chauffeurs » et « moteurs de recherche clients », ce registre des disponibilités taxis est mis en œuvre par le décret n° 2016-335 du 21 mars 2016.
L’intention qui compte
Considérant que la « maraude électronique » est l’un « des standards auxquels les clients du XXIe siècle sont habitués pour le transport particulier de personnes », le projet de LOM prévoit « la généralisation du registre de disponibilité des taxis ». Second aspect du projet de taxi numérique : l’utilisation des données taxis, désormais récoltables grâce à la plate-forme le.Taxi. Les autorités publiques souhaiteraient les intégrer dans les services d’informations multimodales pour favoriser l’information voyageurs. Nous avons sollicité les organisations professionnelles taxis pour savoir ce qu’elles en pensent. Et si toutes affirment la volonté des taxis d’investir la maraude électronique, leurs commentaires en soulignent les enjeux.

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La généralisation du registre des disponibilités et l’accès aux données des acteurs du T3P sont accueillis avec prudence par les professionnels.

A chaque territoire sa réalité
« Il ne faut pas freiner l’évolution du taxi, tout en restant prudents », commente David Bauer, représentant FNDT, Fédération nationale du taxi. « L’obligation du registre est une bonne chose une fois levées les complexités techniques. Le principe ne sera pas le même pour les taxis péri-urbains et ruraux que pour les taxis d’agglo. Il y aura un effet limité sur l’activité car ceux situés hors de leur zone de prise en charge ne pourront pas être visibles mais les règles de priorité établies sur le terrain risquent d’en être perturbées. Disposerons-nous des moyens techniques d’adapter le dispositif à la réglementation actuelle ? Enfin, il nous faudra prendre des garanties de sécurité en s’appuyant sur le RGPD* européen et en veillant qu’il ne soit pas contourné par des montages internationaux ».
Une innovation pour quel profit ?
« Le projet LOM sur les données est très flou. Nous sommes surtout révoltés par le manque de considération du ministère vis-à-vis des taxis», proteste Karim Asnoun, CGT-Taxis. « Nous ne sommes pas contre la création d’une base de données taxis mais il faut que la collecte de ces données servent à la création d’une application nationale taxi. La technologie n’est pas un problème mais elle doit être au service du plus grand nombre. Il serait particulièrement intéressant que les autorités de contrôle puissent par exemple accéder aux données VTC pour enfin les contrôler ! Nous avons besoin de garantie sur l’exploitation de ces données. Les sociétés exploitant des futurs véhicules autonomes seraient sans doute ravies d’exploiter nos données ce qui n’est bien sûr pas acceptable. Nous demandons d’ailleurs à ce que ces véhicules autonomes soient soumis aux mêmes exigences que les taxis pour exercer, ils doivent nous louer ou acheter nos licences taxis.»

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Tandis que 80% des mises en relation restent par téléphone, la « maraude électronique » symbolise une révolution numérique des T3P .

Une plongée technologique
« Seul l’avenir nous dira si ce projet nous apportera des clients mais il n’est pas envisageable de rester dehors », explique Nordine Dahmane, secrétaire général de FO Taxis. « Il ne faut pas craindre une technologie capable de libérer notre profession. Arrêtons de nous faire peur ! Nos données sont déjà collectées de toutes parts et tous les jours. Si le.Taxi n’a pas réussi jusqu’à présent, c’est qu’il a été torpillé par des intérêts privés. Nous sommes favorables à la généralisation du dispositif sous conditions. Il y aura certes des aménagements techniques à prévoir, mais ce ne sont que des questions d’informatique. Concentrons-nous plutôt sur l’obligation de réservation préalable des VTC afin d’éviter la maraude électronique. »
Une stratégie vitale
« Nous sommes favorables à l’innovation mais pas à n’importe quel prix », explique Christophe Jacopin, directeur et administrateur de Gescop dont la plate-forme de mise en relation Alpha Taxis a été précurseur dans le déploiement du dispositif le.Taxi sur la zone de prise en charge des taxis parisiens. « Les représentants du ministère des Transports n’ont pas écouté les professionnels. Sans communication ni stratégie marketing, le service est très peu utilisé car méconnu. De plus, les taxis, leurs clients – voire parfois les deux – doivent supporter un coût supplémentaire, cela décourage les volontaires. L’inscription au registre des taxis est différente d’une connexion obligatoire et ceux qui espèrent la fin des centraux se trompent de combat. Par ailleurs, rendre obligatoire la connexion pose par nature un problème de subordination car il entrave la liberté du choix. »

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Réglementairement réservée aux taxis, la maraude reste un enjeu fort de la concurrence taxis /VTC qu’elle soit numérique ou sur la voie publique !

Une liberté des chauffeurs-entrepreneurs à préserver
« Il est important de continuer à innover et investir pour moderniser le métier. Néanmoins les réflexions doivent prendre en compte les spécificités de notre secteur principalement constitué d’entrepreneurs indépendants », rappelle Armand Joseph-Oudin, représentant de l’UNIT, Union Nationale des Industries du Taxi. « Les chauffeurs de taxi apprécient leur liberté d’organisation. C’est pourquoi nous devons laisser le choix afin de préserver les habitudes de travail de chacun. Certains chauffeurs pourraient être demandeurs de courses supplémentaires apportées par le.Taxi même si l’approche n’est pas rémunérée. Pour d’autres, une obligation de se connecter et d’accepter des courses le.Taxi serait à certains moments incompatibles avec leur planning de la journée et leur clientèle personnelle. C’est pourquoi il faut garantir au chauffeur la liberté de se déclarer disponible uniquement lorsqu’il souhaite recevoir des courses pour respecter son organisation personnelle du travail. »
Avancer en marchant
« La priorité est d’être visible », affirme Rachid Boudjema, président de l’Union nationale des taxis – UNT. « Nous avons l’ambition de développer la maraude électronique et pour ce faire, il est fondamental que la géolocalisation instantanée soit également obligatoire. Si ce projet bouscule le modèle économique de certains acteurs, le dispositif impose de s’interroger sur les intermédiaires qu’il institue. le.Taxi ne pourrait-il pas, à terme, évoluer afin de s’en dispenser ? L’enjeu sera de paramétrer le dispositif mais si demain tous les taxis sont connectés, les données permettront de définir des règles justes. »

Propos recueillis par HM

* Règlement général sur la protection des données.

Plus d’infos :
le.Taxi – accéder au site
Article n°1 de la loi Thévenoud du 1er octobre 2014 – accéder au site
Décret n° 2016-335 du 21 mars 2016 relatif au registre national de disponibilité des taxis – accéder au site
Concertation T3P, 03/05/18 – Extrait – Accéder au document
Concertation T3P, 15/05/18 – Extrait – Accéder au document

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