Occupé par le bras de fer qui l’oppose aux cheminots, le ministère des Transports n’a pas encore réuni le comité T3P annoncé pour le printemps par Élisabeth Borne lors de sa dernière rencontre avec les représentants du secteur. Impatientes de connaître les résultats, les organisations professionnelles taxis comme VTC restent mobilisées sur une situation toujours en tension.
L’Europe enfonce le cloud
Après avoir été remis à sa place en tant que « service de transport » par la Cour de justice de l’Union européenne dans la procédure qui l’opposait à l’Espagne, Uber vient d’être à nouveau débouté dans celle contre l’État français. Se considérant comme un « service de la société d’information », la multinationale reprochait à la France de ne pas avoir informé au préalable la Commission européenne avant de réglementer le secteur et mettait en cause la légalité des poursuites françaises contre deux de ses représentants. « La Cour juge que les États membres peuvent interdire et réprimer l’exercice illégal d’une activité de transport telle qu’UberPop sans devoir notifier au préalable à la Commission le projet de loi incriminant un tel exercice », a déclaré la CJUE le 10 avril dernier. En Grèce, Uber a dû suspendre une partie de son activité face à une nouvelle réglementation qui impose le référencement et le retour au garage des véhicules sans réservation…

S’adaptant à une clientèle désorientée par les grèves, les taxis poursuivent leur reconquête par la qualité.
Apprentis sorciers en préfecture
Alors qu’en Europe, les États semblent enfin jouer à l’unisson, en France, c’est la cacophonie ! En Guadeloupe, l’huissier de justice désigné par le tribunal de grande Instance de Pointe-à-Pitre afin d’effectuer des constatations dans l’enceinte du Grand Port Maritime de la Guadeloupe ne s’est pas vu accorder l’assistance de la force publique. Intervenant dans un contexte conflictuel entre taxis contre VTC et transporteurs occasionnels, l’officier ministériel, soutenu par l’Intersyndicale taxi, a pu finalement accomplir sa mission. Dans les Yvelines, la préfecture a supprimé de son propre chef l’approche de la facturation du service taxi, précisant dans l’article 7 du nouvel arrêté tarifaire que « le trajet depuis le lieu de stationnement ou d’une position intermédiaire jusqu’à la prise en charge du client, ne peut lui être facturé » ! « C’est tellement gros que nombre d’entre nous ont cru à un fake », confie Roméo Pestana, président de l’Organisation professionnelle des taxis des Yvelines. Suite à un recours gracieux resté sans réponse, l’OPTY a saisi le tribunal administratif de Versailles et engagé une procédure demandant l’annulation de l’arrêté ainsi qu’une procédure de suspension en référé afin d’interrompre rapidement les effets pervers qu’une telle mesure pourrait susciter.
LOM providentielle ?
VTC et plates-formes numériques disruptives restent eux aussi sur la brèche. Face aux revendications de tarif – et de considération – minimum, Uber s’est contenté de troquer un fondateur agressif et irrespectueux contre un nouveau Pdg expert en repentir de façade… La multinationale et ses homologues continuent à inciter les chauffeurs à la maraude électronique et leur proposent désormais de décider de leur position d’attente en fonction de la demande alors que la réglementation leur impose de sortir de la voie publique lorsqu’ils ne sont pas réservés. Conscients de l’urgence à réguler l’activité d’intermédiation de transports, les chauffeurs de VTC dénoncent les cadences infernales auxquelles les applications américaines comme 100% françaises les soumettent. Ils menacent de grossir les rangs des manifestants appelés par les organisations politiques et syndicales à se mobiliser le 5 mai prochain et espèrent en la prochaine loi d’orientation de la mobilité – LOM – pour les sortir de l’impasse.
HM

Si la loi Grandguillaume a fixé le rôle des transporteurs du T3P, de nombreux chauffeurs continuent de marauder sans étiquette ni autorisation.