Alors qu’il avance ses pions à Paris, Lyon et Bordeaux, Uber semble avoir renoncé à jeter son dévolu sur la cité phocéenne. Les plans de conquête de la multinationale seraient-ils solubles dans le pastis ? Les taux de congestion de 40 % en moyenne et de 74 % aux heures de pointe ainsi que le contexte socio-économique de la ville auraient-ils quelque effet dissuasif ? Les 1115 taxis marseillais, quant à eux, relèvent le défi quotidiennement grâce à une organisation spécifique et une présence active sur la voie publique. Détails.
Pas comme les autres !
« À Marseille, on porte à cœur », déclare Frédéric Guénou, président de l’Union des Taxis Indépendants de France de Marseille – UTIF 13, affiliée à la FNDT. Organisés en décades, les taxis phocéens sont répartis en quatre groupes. Chaque groupe travaille 12 jours d’affilée suivis de 4 jours de repos, le calendrier étant communiqué au préalable aux chauffeurs afin qu’ils puissent prendre leurs dispositions. En activité, ils n’ont pas de limite de temps de travail. «Les taxis de Barcelone et de Madrid sont organisés sur ce modèle. Ne pas avoir d’horodateur allège la pression sur la rentabilité de chaque course D’autre part, nous ne chargeons pas à l’aéroport et inversement pour nos collègues. Comme cela, chacun reste auprès de ses clients ! » », précise Gilles, taxi marseillais depuis 6 ans. De plus, les taxis au repos peuvent être mobilisés ponctuellement lors de grands événements, une souplesse d’ajustement dont la clientèle sort grandement satisfaite.
Stations sous surveillance
Autre particularité : une mobilisation générale autour des stations. Vampirisées par les véhicules particuliers, les 112 stations taxis étaient devenues inutilisables. «La vidéoverbalisation n’est pas suffisante car les particuliers reçoivent leur verbalisation dans l’anonymat. Mais lorsque le PV est sur le pare-brise du véhicule garé sur nos places, l’automobiliste se déplace rapidement et il y a un effet dissuasif sur le voisinage ! », explique Frédéric. Bénéficiant (!) d’une des taxes de stationnement les plus élevées de France, les principales organisations professionnelles – Alliance FTI13, et UTIF13 – ont exigé de la municipalité un contrôle actif. Désormais la police municipale effectue toutes les semaines un tour de surveillance afin de faire respecter les emplacements et transmet un compte rendu aux organisations professionnelles. Mais l’implication des chauffeurs marseillais ne s’arrête pas là. Affilié aux TRM, Taxis Radio Marseillais, Frédéric nous présente son logiciel de radio. Fonctionnant de manière classique pour les demandes immédiates ainsi que les réservations, son système recense l’offre et la demande de taxis en station. Une façon pertinente d’être au plus près des clients !
Sous le soleil…
À l’image de la station de la gare Saint-Charles qui, derrière les palmiers de son accueil clients, cache une zone d’attente où se côtoient sdf et seringues usagées, l’activité des taxis marseillais ne baigne pas dans l’huile ! La mise en place de navettes gratuites à l’arrivée des navires sur le port a du mal à passer et ça râle en station : « Maintenant, lorsqu’un bateau arrive, c’est à peine deux courses ! Si le Port finance un bus gratuit, c’est qu’il n’a plus besoin de subventions ! » Second point de crispation : le transport de malades. «Nous redoutons de subir le même sort que les licences de pêche qui, lors de leur renouvellement, se sont vues imposer des obligations qui les ont rendues inexploitables », raconte Richard, ancien pêcheur reconverti. Comme ailleurs force de proposition, les taxis marseillais sont pourtant volontaires pour la modernisation de leur activité, soutiennent la simplification des tarifs, insistent pour le retour au siège des VTC… Hélas ils ne semblent guère plus écoutés.
HM