Marié et père de deux enfants, Roberto Legne a sillonné l’agglomération lyonnaise de 1990 à septembre 2013 à bord de son taxi. Désormais à la retraite, il nous fait partager dans son ouvrage « Mémoires d’un taxi driver » toute une foule d’anecdotes, drôles, parfois émouvantes, de sa vie de chauffeur. Une véritable plongée au cœur du métier tel qu’il l’a vécu durant ces 20 dernières années.
Comment êtes-vous entré dans la profession ? A-t-elle changé depuis vos débuts ?
D’abord aide-comptable, j’ai fini par me lasser des chiffres. J’ai découvert le taxi un peu par hasard. Je n’avais pas d’argent devant moi pour ouvrir un commerce et j’enchaînais les missions d’intérim. Un jour, j’ai lu une annonce de place de chauffeur dans la presse locale et je m’y suis rendu. En mars 1990, j’ai passé mon examen. À l’époque, la formation était rudimentaire : il fallait faire moins de cinq fautes à la dictée, connaître la topographie de Lyon et de sa banlieue, savoir manipuler le compteur et s’acquitter d’un droit d’entrée peu onéreux. Aujourd’hui, les chauffeurs doivent suivre une formation exigeante dont un examen de conduite qui s’apparente à un permis de conduire spécialisé. Ce n’est plus une formalité, mais une véritable sélection ! Une fois que l’on commence, nous sommes seuls à bord de nos véhicules. Pendant les courses, la qualité du service à la personne est un des leviers d’une bonne recette. Pour ceux qui se plaignent de la radinerie de la clientèle à donner un pourboire, n’oublions pas qu’il faut savoir le gagner !
Un bon chauffeur, c’est quoi ?
Le taxi est un métier où j’ai appris énormément. Lorsque l’on commence, il faut trouver ses marques, le difficile équilibre entre vie de famille et rentabilité de la présence sur le terrain. Au début, on tâtonne, on se cherche, on vit en décalé, mais l’expérience permet de s’installer. Il y a ceux qui préfèrent la nuit ; moi, je travaillais de jour, avec plus de circulation mais une clientèle plus paisible. Pour être un bon taxi, il faut avoir la fibre commerciale et apprécier le contact avec les clients. Nous sommes des commerçants ambulants. La clientèle lyonnaise n’est pas facile car pour beaucoup, si l’on prend le taxi, c’est qu’on n’a pas les moyens d’avoir une belle voiture ! En outre, les incroyables investissements de l’agglomération dans le transport collectif ont grignoté années après années notre clientèle. En ville, le chiffre d’affaires est aléatoire et nous mesurons chaque jour si la chance nous a donné rendez-vous. À la fin de ma carrière, j’avais moins de travail qu’à mes débuts…
Pourquoi ce livre ?
J’avais envie de faire partager mes 23 ans d’activité. Je voulais faire connaître la vie d’un taxi, contribuer à améliorer l’image de notre profession par mon témoignage. Même si j’ai cessé mon activité, je n’ai pas rompu le cordon avec la profession ! Je suis toujours en contact avec les collègues et il était important pour moi de laisser ma clientèle entre de bonnes mains. Certains pensent que les taxis gagnent leur vie facilement, qu’ils ne font que se balader toute la journée… J’ai voulu faire voir l’envers du décor. Depuis la publication de mon livre, je reçois avec plaisir des remarques et des réactions de lecteurs qui, revenant sur leurs idées préconçues, comprennent que la profession n’est pas un long fleuve tranquille ! J’invite tous mes collègues à parler de mon livre à leurs clients afin qu’ils découvrent la réalité de notre métier.
HM
Plus d’info : http://bit.ly/1Bm4XHb