Posséder une carte professionnelle délivrée par la préfecture ne suffit pas pour stationner et marauder sur la voie publique. Pour cela, il faut y avoir été autorisé par l’administration et détenir une autorisation de stationnement (ADS). Pour faire le point, Maître Jessica Serrano-Bentchich, avocate à la cour, spécialiste en droit public, explique les modalités d’obtention d’une licence et alerte sur les pièges à éviter.
Existe-t-il plusieurs façons d’obtenir une licence ?
J. S-B : Classiquement, il est possible soit d’acheter une licence cessible ‒ il s’agit des licences qui ont été délivrées avant la promulgation de la loi n° 2014-1104 du 1er octobre 2014 ‒, soit de s’inscrire sur une liste d’attente auprès de l’administration territoriale compétente en vue d’obtenir une licence gratuite (1). Selon le lieu de la demande, le temps d’attente est différent, cela peut aller de quelques mois, voire dépasser quelques années. D’où l’importance de se renseigner auprès des acteurs locaux.
Acheter une licence permet-il forcément d’exercer ?
J. S-B : Si le titulaire d’une ADS cessible peut « présenter un successeur à titre onéreux » (1), la vente de la licence ne permet pas à elle seule de marauder et de stationner sur la voie publique. Il faut distinguer d’un côté le contrat de cession (contrat de droit privé) et de l’autre côté l’autorisation de stationnement (acte administratif). L’administration doit être d’accord avec le transfert et l’acter (2). L’autorisation de stationnement de l’acheteur n’est donc pas automatique et le maire peut s’y opposer. Un maire peut fonder un refus d’autorisation sur un motif tiré du non-respect des conditions posées par la loi (exploitation effective et continue de l’ADS par exemple), mais aussi sur des motifs tenant à l’ordre public, notamment à la sécurité et à la commodité de la circulation sur les voies publiques. Aussi, le maire peut prendre en considération des circonstances de nature à mettre en cause la sécurité des personnes transportées (3 et 4).
Comment obtenir une licence gratuite ?
J. S-B : Pour obtenir une ADS gratuite, il faut s’inscrire sur une liste d’attente et remplir certaines conditions : être titulaire d’une carte professionnelle en cours de validité dans le département concerné et ne pas être déjà titulaire d’une autorisation de stationnement (5). Il n’est possible de s’inscrire que sur une seule liste d’attente à la fois. L’inscription doit impérativement être renouvelée tous les ans et ce, avant « la date d’anniversaire », sinon la demande de licence gratuite « tombe à l’eau » (réputée abandonnée) (6). Qu’il s’agisse de la demande initiale d’inscription ou d’une demande de renouvellement, elle sera réalisée par pli recommandé et l’accusé de réception devra être précieusement conservé par le candidat taxi.
Propos recueillis par HM
Plus d’infos :
(1) Article L3121-2 du code des transports
(2) CAA Marseille, 13 octobre 2016, n° 14MA02115
(considérant 7)
(3) Article L3121-6 du code des transports
(4) CE, 24 mars 2014, n° 361510
(5) Article L3121-5 du code des transports
(6) Article R3121-13 du code des transports
(7) Article L3121-3 du code des transports
(8) Article R3121-15 du code des transports et TA Paris, 22 janvier 2019, n° 1810244/6-2
Encadré : Quid de la licence en cas de décès du titulaire de l’ADS ?
Les héritiers doivent rapidement s’interroger sur le sort de la licence. En cas de décès du titulaire d’une ADS, ses ayants droit peuvent présenter un successeur pendant un délai d’un an à compter du décès (7). Après ce délai d’un an, l’ADS sera retirée par l’administration (8) et perdue pour les héritiers. Il est prudent pour le chef d’entreprise de taxis d’alerter ses proches sur l’importance de respecter ce délai et d’anticiper auprès de son notaire, le cas échéant.