Sans commune mesure avec les intempéries du Gard et de l’Hérault, l’orage s’abat brusquement sur ma ville. L’espace d’un instant, la circulation se déboussole. Étourdis par la douche qui arrose violemment leur pare-brise, les automobilistes marquent un temps d’arrêt avant que démarre le ballet de leurs essuie-glaces ; sans capituler face à la chaussée glissante, les conducteurs de scooter et de moto jouent les équilibristes ; vélos et trottinettes accélèrent pour passer entre les gouttes… Quant aux piétons, surpris que le ciel leur tombe sur la tête, ils cherchent frénétiquement à échapper à la pluie autant qu’aux véhicules.
À l’abri dans son taxi, mon chauffeur lâche un « Sale temps pour les piétons… » Pour sûr ! Vu sa place dans la chaîne alimentaire de la mobilité, il ne fait pas le malin, le piéton ! Pourtant, il en occupe de l’espace public. D’après l’enquête « Mobilité des personnes » 2018-2019 du ministère de la Transition écologique, la part de la marche à pied comme mode de transport progresse avec la taille des agglomérations. À Paris, elle représente 38 % des déplacements !
Et les piétons s’organisent. Certains maires dénoncent déjà la naissance d’un nouveau lobby après celui des cyclistes. Publiée par un collectif associatif début septembre, la première édition du « Baromètre des villes marchables » révèle le ressenti des 43 000 adeptes de la marche à pied qui ont participé à ce sondage national. Strasbourg, Rennes, Nantes, Dijon, Metz ou encore Annecy sont plébiscitées. Paris enregistre un classement honorable alors que Marseille, 200e, est pointée du doigt. Le 17 septembre prochain, les premières « Assises de la marche en ville » auront lieu dans la capitale phocéenne et de nombreux piétons entendent bien obtenir « justice spatiale » !
Je demande son point de vue au chauffeur de taxi qui me conduit, il répond dans un sourire : « Plus il y aura de piétons, plus nous aurons de clients ! »
Hélène Manceron
Plus d’info :
Enquête « Mobilité des personnes » 2018-2019
« Baromètre des villes marchables »