Caché sous un masque jetable, mon chauffeur de taxi sourit jusqu’aux yeux lorsque je m’installe dans la voiture. Sur le dos de la banquette avant, aux côtés des pictogrammes rappelant les gestes barrières, il a affiché un message de son médecin attestant qu’il a été vacciné contre le Covid-19. « Sans être vacciné, je ne voulais pas travailler. J’avais trop peur car ma santé est fragile. Il fallait que je reprenne mon taxi car les aides ne suffisent plus. Aujourd’hui, ce n’est plus du virus dont j’ai peur. C’est l’attente interminable en station et le racolage de chauffeurs illégaux qui vont me faire sombrer en dépression. »
Voilà un an déjà que la pandémie a donné un coup d’arrêt aux mobilités et aux rassemblements publics. Les images de rues désertes et de villes fantômes font partie désormais de l’imaginaire collectif et alors que d’aucuns rêvaient d’une ville qui ne s’éteint jamais, les couvre-feux et confinements successifs chronomètrent nos journées. Le président de la République avait martelé l’entrée en guerre, mais l’armistice se fait attendre… Le système hospitalier reste sous tension et la vaccination de 67 millions d’habitants est une course de fond dans laquelle nous venons seulement de passer le cap des 5 millions…
Face aux réticences et aux craintes, le gouvernement tente de rassurer mais les atermoiements et les demi-vérités ont largement entamé son capital confiance. Sans perspective, de nombreuses entreprises sont à vif malgré le soutien économique. Le désarroi et l’impuissance invitent soit à la révolte, soit à la déprime. Dans son point hebdomadaire du 25 février dernier, Santé publique France annonçait une augmentation de 29 à 34 % du nombre de personnes ressentant un état anxieux ou dépressif.
À défaut d’œuf de Pâques, vous reprendrez bien un petit antidépresseur ?
Hélène Manceron