Bruxelles tape du poing – S. Bouchal, Brussels Taxi Fed – BTF

« Uber doit s’adapter à notre législation », « C’est encore nous qui disons le droit, pas Uber qui le dicte. » Les propos tenus par le ministre-président de la région de Bruxelles-Capitale, Rudi Vervoort, résonnent comme un espoir pour la majorité des taxis à travers le monde. Rendues en janvier dernier, les conclusions de la cour d’appel de Bruxelles dans le litige opposant les taxis au secteur des sociétés de location de voiture de luxe avec chauffeur (LVC) équivalent des VTC en France – qui travaillent pour la plateforme ont déclenché cette prise de conscience, mais la multinationale n’a pas dit son dernier mot. Témoignage et explications de Sam Bouchal, secrétaire général de la Brussels Taxi Fed – BTF.

Sam Bouchal, Brussels Taxi Fed

Que nous apprennent les conclusions judiciaires ?
J’ai personnellement initié la procédure auprès de la cour d’appel du tribunal des entreprises de Bruxelles. Elle a permis de dévoiler le montage juridique établi par la plateforme pour contourner la loi. Après la condamnation d’Uber Pop en 2015, Uber a élaboré, en Belgique, une nouvelle construction juridique par laquelle les utilisateurs ne sont plus des clients mais les membres d’une association, inscrits d’office à la Platform Rider Association (PRA). Pour donner l’apparence de satisfaire à la réglementation, cette association souscrit des contrats d’achats groupés auprès de différentes sociétés LVC à Bruxelles pour y servir ses clients. Nos avocats ont enquêté jusqu’à Amsterdam et ont découvert une coquille vide. Une association fantôme qui revendique 120 000 membres sans droit de vote ni assemblée générale ! Les juges ne se sont pas laissé abuser et les conclusions sur le transport rémunéré de personnes qu’ils ont rendues le 15 janvier dernier réaffirment la réglementation du secteur.
Comment ont réagi les autorités bruxelloises ?
Même si Uber a initié deux questions de constitutionnalité sur des motifs annexes à la décision judiciaire, le ministre-président de la région de Bruxelles-Capitale, Rudi Vervoort, a considéré qu’après de longues années d’abus et des pratiques frauduleuses, les autorités bruxelloises ne pouvaient plus attendre pour appliquer la loi. L’ordonnance bruxelloise est claire. Les LVC peuvent circuler pour leurs clients uniquement sur la base d’un contrat écrit préalable d’une durée minimale de trois heures. De plus, le dispatching de courses immédiates via smartphone, talkie-walkie et autre est interdit car la maraude électronique est exclusivement un service du ressort des taxis. En travaillant avec Uber, les entreprises de LVC s’exposent à la saisie de leurs véhicules, à des poursuites pénales ainsi qu’à u
ne sanction administrative de suspension temporaire, voire un retrait définitif de leur autorisation d’exploiter.

2015, Porte Maillot, les taxis bruxellois étaient venus soutenir leurs collègues de France dans leur combat contre l’ubérisation.

Quelles sont les batailles à venir ?
Afin d’éviter l’application de la loi, Uber et ses partisans ont manifesté sur la voie publique, interpellé les médias et menacent d’un bain de sang social. Le secteur du taxi répond que cet argument est fallacieux dans la mesure où les entreprises de taxis proposent d’embaucher entre 500 et 600 chauffeurs bernés par la plateforme américaine. Si nous sommes à nouveau bafoués, nous ne pourrons que nous révolter. Nous ne sommes pas contre un remaniement de la réglementation et nous avons fait déjà de nombreuses propositions en ce sens. Nous exigeons seulement que la distinction entre taxi et LVC soit nette et sans ambiguïté. Dans ce combat, je souhaite remercier les taxis bruxellois et de Belgique pour leur mobilisation. Je tiens à remercier également les collègues de Californie, d’Espagne, d’Italie ainsi que de France qui nous soutiennent publiquement sur les réseaux sociaux. En juin prochain, j’aurai d’ailleurs le plaisir de participer aux Globes du taxi à Paris.
Propos recueillis par HM

Plus d’infos – www.brusselstaxifed.be
A lire : « Uber, un modèle en voie de destruction », Hubert Horan – analyse

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.