Taxis/T3P : au cœur de la bataille

Durant la crise, le T3P, transport public particulier de personnes, reste au cœur d’une vraie bataille politique. Assurant le service après vote de la loi qui porte désormais son nom, Laurent Grandguillaume déclare : « Si les règles ne sont pas respectées, cela signifie qu’il y a une démission du ministre, ce qui est grave. » Tandis que plus de 2 000 taxis se sont réunis dans l’action collective #ActionTaxi afin d’obtenir réparation du préjudice infligé par Uber, les plateformes de mise en relation pour un transport par VTC continuent de jouir d’une certaine impunité. Elles ont d’ailleurs été pointées du doigt lors de la réunion annuelle de l’U2P, organisation patronale réunissant les artisans et chefs d’entreprises de proximité. Malgré une forte volonté des pouvoirs publics locaux d’inscrire les taxis dans la mobilité et l’action sociale, le gouvernement, accaparé par la crise sanitaire, laissera-t-il la situation s’envenimer à nouveau ?

A l’U2P, la ministre du Travail a été interpellée sur le contournement de la loi par les plateformes numériques.

Place de la proximité
Rassemblant les entreprises du bâtiment, les métiers de l’alimentation, les métiers de l’artisanat et des services – dont les taxis –, les professions libérales ainsi que les artisans des travaux publics et du paysage, les Rencontres de l’U2P – Union Nationale des Entreprises de Proximité – ont été l’occasion d’une passe d’armes entre le président de l’U2P et la ministre du Travail. Dans un contexte de fronde des restaurateurs et cafetiers face aux nouvelles restrictions administratives pour enrayer l’épidémie, Laurent Munerot a exprimé le refus du « contournement du droit organisé par certaines plateformes numériques, notamment dans le domaine du transport de personnes et de la livraison de repas », soulignant que « ces plateformes s’attachent la force de travail de personnes qui ont un statut d’indépendant (le plus souvent de micro-entrepreneur) sans en avoir les caractéristiques ». Réponse d’Élisabeth Borne : « Tous les acteurs doivent jouer avec les mêmes règles du jeu »… tout en réaffirmant la volonté du gouvernement de « faire des travailleurs de plateformes de vrais indépendants » ! Dialogue de sourds ?

En ville, les voies de circulation sont un point de tension quotidien.

Innover durablement
Partout dans les territoires, les taxis continuent d’innover. À Paris, la société Hype a annoncé son ambition d’atteindre les 600 conducteurs roulant à l’hydrogène courant 2021 et un objectif de 10 000 véhicules en circulation à l’horizon 2024. Côté clients, les efforts engagés en matière de sécurité sanitaire pour la prise en charge des passagers commencent à payer, à en croire les résultats communiqués par G7. Dans le Tarn, afin de contribuer à la lutte contre les violences faites aux femmes, la préfecture de région a initié un dispositif « Bons taxis » qui permet aux taxis partenaires de donner aux victimes – sur décision administrative – les moyens de fuir le pire. Toutefois les taxis restent dangereusement impactés par la paralysie du secteur touristique et de loisirs. Dépendant du Fonds de solidarité dont ils peuvent bénéficier jusqu’en décembre prochain, ils attendent avec inquiétude leur nouvel échéancier de cotisations sociales.

HM

« JE COMPRENDS QUE LES CHAUFFEURS DE TAXIS MÈNENT UNE ACTION EN JUSTICE »

Laurent Granguillaume a multiplié les rencontres lors de sa médiation pour la pacification du secteur.

Laurent Grandguillaume
Rapporteur de la loi du 29 décembre 2016

Expert incontesté du T3P, Laurent Grandguillaume apporte son éclairage sur l’action collective #Action Taxi
Quel regard portez-vous sur l’action collective menée par les taxis ?
Suite au conflit de 2016, une loi a été votée à l’unanimité au Parlement après un long travail de concertation avec tous les acteurs, chauffeurs de taxi comme de VTC. Tous les décrets ont été pris (examen commun, Loti, responsabilité des plateformes…) sauf celui concernant l’article 2 qui permet une régulation de l’État par le data. Le décret est bloqué par l’actuel ministre des Transports, M. Djebbari, alors que la loi a été votée il y a maintenant quatre ans. C’est un choix politique de sa part car comment expliquer autrement qu’un décret ne puisse être publié quatre ans après le vote d’une loi à l’unanimité au Parlement ? Finalement, le ministre désarme l’État. Je comprends donc tout à fait que les chauffeurs de taxi mènent une action en justice dans ce contexte pour que l’état de fait ne s’impose plus à l’État de droit.
Comment expliquez-vous que règles qui encadrent l’activité des VTC semblent aujourd’hui peu respectées ?
Si les règles ne sont pas respectées, cela signifie qu’il y a une démission du ministre, ce qui est grave. Toutes les dispositions sont prévues pour faire respecter le droit, en dehors de l’article 2 de la loi de 2016 auquel je faisais référence. Nous ne sommes pas au Far West mais en France. J’espère donc qu’il y aura une prise de conscience et un renforcement des contrôles comme en 2016, en particulier dans les gares et les aéroports. J’ai confiance dans les capacités de notre État à faire respecter les règles qui permettent une concurrence saine et loyale. Il faut par contre une volonté politique claire. L’ubérisation ne peut être une concession sauvage dans un pays où la République a encore un sens.
Est-ce à l’État d’encadrer de façon plus stricte l’activité d’une société comme Uber ?
Le cadre est clair, toutes les activités de mise en relation entre chauffeurs et clients doivent s’inscrire dans le respect des règles d’une centrale de réservation. Il y a une responsabilité dans cette mise en relation et des vérifications doivent être opérées pour que les chauffeurs respectent bien les règles du transport public particulier de personnes. Bien plus qu’Uber, l’ubérisation au sens large ne peut être une concession sauvage dans un pays où la République a encore un sens.


Propos recueillis par Capucine Coquand

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