Entré en vigueur le 1er octobre 2018, l’article 80 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017 génère la révolte et la confusion des transporteurs sanitaires, ambulanciers/VSL comme taxis. Afin d’unifier les modalités de prise en charge des dépenses, la mesure confie aux seuls établissements de santé la responsabilité du financement des transports inter et intrahospitaliers, une réorganisation engagée par l’Assurance maladie qui impose de nouveaux défis au secteur.
Usine à gaz
Enjeu d’un antagonisme de longue date entre l’Assurance maladie et les établissements de santé, la mesure semble ne pas tenir compte de l’accroissement mécanique du volume de transports de malades résultant de la politique d’hospitalisation à domicile, de l’émergence de plateaux de soins et du vieillissement de la population. Elle oblige les établissements à créer une interface numérique afin de rationaliser les coûts en développant les transports partagés. Chaque hôpital ayant le libre choix de son éditeur de logiciel, la mise en place enregistre déjà de nombreux bugs hormis certains départements pilotes qui avaient mis à profit le délai d’application d’un an pour anticiper mesure. Par ailleurs, la sélection des transporteurs sanitaires se faisant désormais par appel d’offres de l’établissement prescripteur, la multitude des cas particuliers complexifie sa mise en œuvre.
Ambulanciers sur le front
Après de multiples actions à Paris comme en régions, de nombreux ambulanciers alertent sur l’ubérisation de leur métier. « C’est la course aux prix les plus bas », dénoncent les manifestants. Déjà, de grands groupes se sont positionnés sur la réalisation de ces transports en cassant les prix. Conscients des impératifs budgétaires de l’Assurance maladie et de la pression financière qui pèse sur les établissements de santé, les entrepreneurs ambulanciers interpellent sur les risques de dérives : perte de la liberté du patient de choisir son transporteur, demande abusive de remise, irrespect des consignes d’appels d’offres… Recevant une partie de la profession, le ministère de la Santé a réaffirmé sa volonté d’inciter les hôpitaux à « rationaliser les transports » et s’est engagé à rappeler les règles dans un courrier aux établissements dans les prochains jours.
Relever le défi
Impliqués dans ces transports par le biais du conventionnement, certains chefs d’entreprise de taxis ont rejoint la contestation des ambulanciers. D’autres, décidés à relever le défi de cette réorganisation saisissent l’occasion de conquérir de nouveaux marchés. « Depuis un an et demi que la mesure a été proposée, de nombreux agents hospitaliers n’utilisent toujours pas la plate-forme numérique de transport qui a été mise en place », regrette Brigitte Schuk, présidente FNDT de la Haute-Marne (52). « La répartition des courses se base d’abord sur le libre choix du patient puis sur un tour de rôle assumé par les transporteurs qui se sont inscrits sur la plate-forme afin de pouvoir participer. Chaque entreprise inscrit les disponibilités de son planning et les refus de courses sont pénalisés. Pour structurer notre offre de transport, taxis conventionnés et ambulanciers de Haute-Marne mettons en place un groupement départemental sous forme de GIE. Sa finalisation permettra d’ouvrir de nouveaux segments de transports, non seulement pour les assistances mais également pour le développement des déplacements ruraux. » Côté financier, l’appel d’offres lancé en juillet 2018 a été un échec et un nouvel appel est projeté au premier trimestre 2019. Reste à espérer qu’il ne sorte pas des clous pour alléger la note…
HM