« Les taxis, c’est la classe ouvrière en détresse. Il faut remettre l’humain au cœur de l’écoute. C’est ce dialogue avec la profession qui crée la conscience des conséquences de l’ubérisation. Il faut revenir au rationnel et aux vraies batailles ! » Conseillère de Paris depuis 2008 et coordinatrice du Parti de Gauche, Danielle Simonnet a décidé de lutter contre l’ubérisation de la société par des moyens peu usités par nos politiques, c’est le moins qu’on puisse dire ! « Uber, les salauds et mes ovaires » – « conférence gesticulée » qui mêle analyse de notre société et anecdotes personnelles – lui permet de toucher un public plus large que celui habitué aux meetings.

Danielle Simonnet, conseillère de Paris et coordinatrice du Parti de gauche.
Pourquoi avoir écrit ce spectacle ?
L’humour est l’art révolutionnaire. Il permet de casser les frontières et les codes en touchant à l’émotion. Il faut savoir éveiller les consciences en mêlant une approche culturelle et humoristique. Dans mon parcours militant, j’ai toujours été à la recherche de nouvelles pratiques pour impliquer et convaincre. Face à la mise en scène d’une petite caste éloignée des préoccupations des citoyennes et des citoyens, pourquoi ne pas assumer de monter sur scène à mon tour pour convaincre ? Il y a une coupure entre le monde politique et le monde citoyen. Il faut se rapprocher, remettre l’humain au cœur de l’action politique. Quelle que soit l’évolution de ma carrière politique, je garde le contact avec le terrain. C’est la découverte de la profession de taxi qui m’a ouvert les yeux sur les conséquences catastrophiques de l’ubérisation, un phénomène qui dépasse ce secteur d’activité.
Quel est votre objectif ?
Il faut contrer l’idéologie dominante qui martèle que l’ubérisation serait une chance pour la croissance alors qu’elle ne vise ni plus ni moins qu’à imposer un modèle du travailleur sans droits, casser les réglementations des métiers, appauvrir l’État par l’évasion fiscale et remettre en cause notre modèle de protection sociale hérité du Conseil national de la Résistance. L’objectif d’Uber est de capter un fichier numérique pour imposer ses intérêts après avoir étranglé tous ses concurrents. L’ubérisation par le consumérisme entraîne un suicide social collectif de la société, c’est une nouvelle étape du capitalisme qui s’inscrit au bénéfice d’une oligarchie. Le phénomène permis par l’évolution technologique va profiter aux multinationales, au lobbying de la web économie. Nous avons donc une bataille culturelle à mener contre ce modèle prédateur et esclavagiste.
Comment expliquer le succès du spectacle auprès des chauffeurs ?
Beaucoup de taxis m’ont envoyé des messages poignants après la présentation de mon vœu au Conseil de Paris, qui portait sur l’enjeu de la réinstallation des bornes et des stations et la relance de l’application « ParisTaxi » dans la capitale. Ma prise de parole – qui n’avait pourtant été d’aucun effet vis-à-vis de mes homologues politiques – a reçu un large écho auprès des taxis, pourtant plutôt éloignés de l’électorat « présupposé » du Parti de Gauche. Par la suite, j’ai multiplié les rencontres et les soutiens à leur lutte. Ce spectacle, je l’ai construit en retraçant tous ces échanges et avec l’objectif de faire prendre conscience à l’ensemble des citoyens de l’ubérisation à l’œuvre dans bien d’autres secteurs d’activité, dont les taxis sont les premières victimes cobayes. Je pense qu’ils s’y retrouvent ! Aussi, j’assume dans ce spectacle, à partir d’anecdotes personnelles, d’aborder la difficulté d’être femme en politique dans notre société toujours dominée par le patriarcat et le sexisme ordinaire. Je crois que sortir de sa zone de confort, assumer la prise de risque en montant sur les planches, quelque part se mettre « à nu » tout en restant soi-même, la sincérité, l’humour et l’émotion, permettent de rompre la distance entre « le » politique et les citoyen-ne-s. Bref, convaincre !
Propos recueillis par HM
Prochaines dates :
– Le 25/11/16 à Nevers, 20h, Galerie Usanii, 27 bis rue Saint-Etienne
(représentation gratuite et exceptionnelle)
– Le 8/12/16 à Saint-Etienne, 19h, au Comédie Triomphe,
9 square Violette
– Le 18/12/16 à Paris 19e, 20h, au théâtre Clavel, 3 rue Clavel
Réservations /// Plus d’info