« Pas une soirée pour gagner sa vie mais pour sauver des vies… « 

Ce sont les premiers mots de Nacer Dalaoui au lendemain des attentats… En provenance d’Orly ce vendredi 13, il vient de déposer ses clients à proximité de la Bastille. Depuis quelques instants, la folie meurtrière endeuille Paris. Prémices d’une tragédie à ciel ouvert et de tout un bataclan de tristesses…
Les rues et les places s’emplissent, ça court dans tous les sens au rythme de la stridence des sirènes de secours dont le concert en continu dit déjà toute l’ampleur du carnage. Nacer reçoit des appels de sa famille et d’amis pour lui dire d’éviter le 11e arrondissement. Trop tard, il est déjà sur place. Une jeune fille en pleurs vient même de s’engouffrer dans son taxi.
À l’instar de nombre de ses collègues, il a estimé qu’il était de son devoir de rester sur place pour évacuer des gens qui, après avoir vu de près l’apocalypse, avaient besoin de s’épancher… Ce soir-là, alors que les stations de métro fermaient les unes après les autres, les chauffeurs, mus par leur volonté de porter assistance, incarnèrent l’esprit du service au public…
Comparaison n’est pas raison, mais cet élan de courage et de solidarité des taxis, salué par la maire de Paris, Anne Hidalgo, rappelle celui des taxis de la Marne en septembre 1914. Au général Gallieni qui leur demandait s’ils n’avaient pas peur de monter au front, ils répondirent : « On fera comme les camarades, on ira partout où il faut .» En cette soirée noire du vendredi 13, les taxis se sont portés là où il fallait, dans un élan qui s’est prolongé au cours du week-end.
Ainsi, Laurent Olier raconte que le samedi soir, il a chargé rue du Liban des jeunes gens pour les conduire à la cellule d’aide psychologique de la mairie du 11e. Parmi eux, une passagère ; elle avait perdu son petit ami au Bataclan. À l’arrivée, il a refusé d’être payé : « Que pouvais-je faire de plus pour leur témoigner ma sympathie ? », dira-t-il. Ce témoignage n’est pas isolé. De nombreux taxis se sont spontanément rendus dans les hôpitaux tout au long du week-end, pour aider, être là simplement.
L’heure était encore aux solidarités et non aux questions qui plus tard reviendront en boucle, à commencer par celles-ci : Quel Dieu de quelle religion prescrit-il de tirer dans le tas et avec lâcheté ? Ceux qui prétendent être inspirés par Dieu ne le dénaturent-ils pas scandaleusement en le transformant en organisateur de massacres ? On voit par là que ceux qui parlent et agissent en lieu et place de Dieu pour massacrer des innocents le blasphèment. Marteler encore ici que, quelle que soit notre orientation religieuse ou son absence, nous sommes d’abord tous reliés entre nous par un fil invisible qui a pour nom l’Humanité…
Il faudra du temps pour se relever, mais l’esprit parisien fécondé par un certain cosmopolitisme de l’art de vivre renaîtra dans la continuité du Paris est une fête d’Ernest Hemingway, ouvrage dans lequel l’écrivain américain relate ses souvenirs heureux de la capitale. Depuis les attentats, ce livre est devenu un symbole de l’âme meurtrie de Paris. Il reste à souhaiter qu’il ne le soit pas seulement par nostalgie d’un temps révolu. Au moment où les familles enterrent leurs morts, qui sont aussi les nôtres, rappelons-nous ce que disait Hemingway : « Un homme, ça peut être détruit, mais pas vaincu »

Laurent Lasne, auteur du livre « Uber, la prédation en bande organisée », éd. Le Tiers Livre – sept. 2015

Couv L Lasne

Commander l’ouvrage – http://bit.ly/1XsRV7j 

 

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