Depuis que les feux d’artifices et les embrassades célèbrent la nouvelle année, le couperet de l’interdiction devrait s’être abattu sur les agissements d’Uber et de son application UberPop. Au seul bénéfice des taxis ironisent certains mais, en réalité, au profit de la clientèle et de la sécurité publique. Depuis la Noël, les témoignages négatifs de clients ne cessent de s’accumuler contre les services de la multinationale en raison du comportement indélicat d’un chauffeur mais surtout du coup de massue reçu par le passager arrivé à destination à l’annonce du prix de la course. Du côté des chauffeurs affiliés à l’application, c’est également le temps des désillusions et les procédures entre ex-chauffeurs et la multinationale risquent de se multiplier en 2015. « La désobéissance civile est nécessaire pour défendre les bonnes causes », déclarait Travis Kalanick, le patron d’Uber, au magasine Capital daté de janvier 2015. Dans le cas présent, la « bonne cause » est surtout sa propre entreprise, une bulle spéculative que dénoncent de nombreux médias spécialisés en économie digitale ainsi que plusieurs de ses confrères de mise en relation avec un VTC. Pour Mr Kalanick, l’appel à la désobéissance civile n’engage que ceux qui y répondent car en cas de problème, la multinationale se retranche derrière son irresponsabilité juridique et envoie ses chauffeurs au casse-pipe… Des motivations très éloignées de celles de Gandhi ou de Martin Luther King lorsqu’ils appelèrent à la désobéissance civile, le premier pour l’indépendance de l’Inde, le second pour l’abolition des lois de ségrégation raciale… « Je déteste le socialisme et la régulation », renchérit notre cher Travis dans son interview. Pourtant, l’état de droit, si gênant aujourd’hui pour Uber, lui a permis de se développer et le protège contre tout autre énergumène de son acabit qui voudrait se faire justice lui-même ! Fondement des régimes démocratiques, l’état de droit repose à la fois sur le principe de légalité et le principe d’égalité. Précarisés par les méthodes de la multinationale, taxis, ex-grandes remises et VTC attendent l’application de la loi Thévenoud du 1er octobre 2014 avec impatience afin de pouvoir lutter à armes égales contre la concurrence et faire valoir leurs atouts. L’état parviendra-t-il à dompter les pirates de l’ère digitale ?
Hélène Manceron