« Transporteurs avant tout » – Y. Andraud, GTPVT

« L’Angleterre et l’Amérique sont deux pays séparés par la même langue. » Cette phrase de G. B. Shaw pourrait s’appliquer sans mal aux chauffeurs de taxi et de VTC. Malgré le conflit qui les oppose, il existe de part et d’autre des esprits suffisamment lucides pour discerner les véritables enjeux et désigner les responsables de la crise qui secoue aujourd’hui le transport de personnes. C’est le cas d’Yves Andraud, vice-président du Groupement des transporteurs de personnes en voitures de tourisme, qui n’hésite pas à dénoncer les agissements des sociétés d’applications smartphone.
Dans le transport et le tourisme depuis trente ans, ex-grand remisier, vous avez adressé une lettre ouverte au médiateur, le député Thomas Thévenoud.
J’ai participé aux réunions en tant que porte-parole du GTPVT, mais c’est bien en tant que chef d’entreprise à la tête d’une société qui exploite 12 véhicules et emploie une quinzaine de chauffeurs que je me suis permis d’interpeller M. Thomas Thévenoud. D’abord pour lui exprimer que j’avais particulièrement apprécié son entrée en matière dans laquelle il affirmait que les différents intervenants devaient respecter les « règles du jeu » ; mais aussi pour lui indiquer que, parmi les présents lors de ces réunions, certains qui ne respectaient justement pas les règles du jeu n’étaient sans doute pas à leur place…

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À qui pensez-vous ? Aux sociétés d’applications smartphone ?
VTC comme taxis, notre activité première est celle de transporteurs de personnes. Ces nouveaux acteurs que sont les sociétés d’applications smartphone de mise en relation ne sont pas à la base des transporteurs, mais de simples apporteurs d’affaires, en un mot, des centrales de réservation. Elles ne s’appuient pour leurs activités que sur de la sous-traitance, des sociétés de VTC nouvellement créées ou des auto-entrepreneurs. J’estime pour ma part que le fait de ne pas avoir organisé d’ateliers distincts entre, d’un côté, transporteurs (taxis et VTC), et sociétés d’applications smartphone de mise en relation de l’autre, constitue une erreur dans le bon déroulement de la mission.
Selon vous, ces sociétés auraient une influence néfaste sur le secteur et, notamment, sur la qualité de service dont se prévalent les VTC ?
Les plates-formes de mise en relation ne s’appuient pas sur les entreprises existantes pour développer l’emploi dans le secteur en raison des tarifs qu’elles proposent, elles se moquent de la rentabilité de l’activité de transport car ce ne sont ni leurs véhicules, ni leurs chauffeurs, ni leurs investissements en matériel roulant. Leur montage juridique est simple. Par exemple, elles créent une société pour la location du véhicule et une autre pour l’affiliation au réseau et travaillent en sous-traitance avec des auto-entrepreneurs qu’elles payent 8 € de l’heure alors que le SMIC est à 9,53 €. Cette situation engendre un sous-prolétariat de chauffeurs ! Nous avons alerté le médiateur sur cette distorsion entre transporteur et plate-forme de mise en relation.
Les chauffeurs seraient donc également responsables de cet état de fait ?
Partiellement. Notre profession de VTC connaît un large problème de recrutement et de formation des chauffeurs. Aujourd’hui, quelques-uns ne sont que des mercenaires loin de répondre aux critères exigibles par notre clientèle. À leur décharge, de nombreux patrons peu scrupuleux leur demandent de se rendre disponibles à certaines périodes et, au dernier moment, ne respectent pas leurs engagements sans compensation pour le chauffeur. Les sociétés de mise en relation par smartphone sont obligées de solliciter leurs chauffeurs à être toujours dehors pour donner un effet de réseau lorsque le client consulte son portable mais l’activité est essentiellement limitée à l’Ouest parisien. Et, lorsqu’ils font appel à des auto-entrepreneurs, cela s’apparente à du salariat déguisé, car les chauffeurs doivent se réserver pour un employeur unique…
Que préconisez-vous ?
Le GTPVT a demandé au médiateur un renforcement de l’accès à la profession pour les entrepreneurs car si un chauffeur développe son activité comme auto-entrepreneur, il évite la formation. De même, nous réclamons une formation des chauffeurs fondée sur le savoir-faire et le savoir-vivre, moins qualifiante que celle des taxis dont l’activité demande une formation de chef d’entreprise. Quand je recrute un chauffeur, je cherche une personnalité. Notre prestance et la confiance justifient 80 % du tarif de nos courses.

LT Propos recueillis par HM

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