L e nombre d’automobilistes ayant opté pour un véhicule électrique reste marginal. Pourtant le système et le réseau de recharge de ces véhicules se développe de mois en mois. Vincent Bolloré aurait investi près de 2 milliards d’euros depuis qu’il s’est lancé dans l’aventure électrique. Batteries, véhicules en autopartage, partenariat avec Renault et, surtout, implantation et gestion des bornes de recharge à Paris, Bordeaux, Indianapolis et bientôt Londres, le groupe – qui pèse aujourd’hui 8 milliards d’euros – fait feu de tout bois et tisse sa toile à travers le monde.
Le phénomène Bluecar
Depuis un an, le modèle 4 places de la Bluecar est disponible pour les particuliers pour la coquette somme de 12 700 euros bonus déduit, mais elle était déjà connue des Franciliens depuis 2011 grâce au système de libre-service Autolib’ mis en place dans la capitale par le maire de Paris, Bertrand Delanoë. Le succès s’est exporté rapidement à Lyon, sous l’appellation Bluelys, et se déploie depuis janvier 2014 à Bordeaux avec BlueCub – Cub comme « communauté urbaine de Bordeaux ». En l’espace de deux ans, la drôle de petite voiture est devenue une figure familière du paysage parisien et Autolib’, qui revendique aujourd’hui 3000 véhicules disponibles et 30 000 abonnés, devrait atteindre son seuil de rentabilité en 2015. Pourtant, selon les spécialistes, cette ascension fulgurante ne serait qu’un bonus pour Bolloré dont l’objectif initial était de promouvoir une technologie exclusive de batteries…
Des batteries plus fiables
Avec sa batterie LMP, c’est-à-dire lithium-métal-polymère, fabriquée au Canada (et en Bretagne, of course…), l’industriel revendique une fiabilité et une autonomie supérieures aux batteries lithium-ion qui équipent la concurrence, en dépit de ceux qui dénoncent son fonctionnement énergétivore et donc peu écologique. Au point que les spécialistes n’avaient pas hésité à déclarer que les Autolib’ n’étaient en réalité qu’un test grandeur nature permettant de démontrer sa supériorité technique. Or, on s’aperçoit aujourd’hui qu’il existe un troisième étage à la fusée, sans doute le plus important pour Bolloré, et que ses batteries n’étaient qu’une rampe de lancement pour développer un « plan électrique » à l’échelle de la planète.
Densifier le maillage
Au-delà même du prix encore prohibitif du véhicule et de la location de la batterie, la crainte de tout acheteur de voiture électrique est de tomber en panne de « carburant » au milieu de nulle part. Or tous les experts s’accordent pour dire qu’à moyen terme, on ne dépassera guère les 200 à 250 km d’autonomie dans le meilleur des cas. Renault avait bien pensé avoir trouvé la parade en misant sur l’échange de batteries, un procédé comparable à un plein d’essence et en tout cas beaucoup plus rapide que la recharge. Hélas son partenaire israélien Better Place vient juste de faire faillite…
Encore une fois, c’est de Bolloré que vient la solution. Lorsqu’on l’interroge sur les réticences des consommateurs, il répond par le développement du maillage de bornes électriques : « L’un des points pour le développer, c’est d’avoir un réseau national de bornes. » Le gouvernement l’a également compris qui envisage une proposition de loi pour créer un opérateur national chargé de pourvoir la France d’un réseau dense et efficace. EDF est sur les rangs mais le groupe Bolloré possède un temps d’avance. Après avoir installé 90 % des bornes existant actuellement à Paris, Lyon et aujourd’hui Bordeaux, il vient de décrocher successivement le service d’autopartage 100 % électrique d’Indianapolis aux États-Unis ainsi que le marché londonien. Ironie de l’histoire, le groupe avoue s’être inspiré du maillage des stations-service… stations qui ont pratiquement disparu des grands centres urbains !
LT