A lors que nous nous apprêtions à diffuser ce numéro, un communiqué nous informe que les taxis du Loiret sont également, comme tant d’autres de leurs confrères, dans l’impasse. Pour preuve, ils ont boycotté pour la seconde fois la commission préfectorale qui devait se dérouler hier afin de « protester contre l’irréalité qui règne dans [leur] département en matière de gestion de [leur] profession ». Un peu d’humour n’ayant jamais fait de mal, nous leur dédions cette petite fable empruntée à Dominique Dupagne, un médecin qui n’a pas sa langue dans sa poche ainsi que vous pourrez le lire dans ce numéro.
« Deux universités ont pour habitude de se confronter chaque année dans une course d’aviron. Le doyen de l’université A, qui a perdu les deux courses précédentes contre l’université B, décide d’appliquer à son équipe les techniques de management modernes enseignées dans son établissement. Il débloque un budget conséquent pour ce projet et fait appel au cabinet de conseil fondé par d’anciens élèves. Les deux équipes s’entraînent dur.
À l’heure de la compétition, le bateau A perd de justesse.
Très vexés par cet échec, le doyen de l’université A et les consultants se réunissent pour en rechercher les causes.
Un audit de haut niveau est ordonné. Après enquête, elle constate que l’équipe A est constituée d’un barreur, de cinq consultants et de trois rameurs, alors que l’équipe B comporte un barreur et huit rameurs. La direction décide de se donner les moyens de la victoire pour l’année suivante
et confie cette mission à un groupe d’experts reconnus qui proposent de procéder à une réorganisation totale du bateau A.
Des modifications structurelles intégrant un processus qualité avec des contrôles réguliers des procédures appliquées doit améliorer le rendement et la productivité. La nouvelle équipe comprend désormais un directeur général d’aviron, un directeur adjoint d’aviron, un manager d’aviron, un superviseur d’aviron, un consultant qualité, un contrôleur de gestion, un chargé de la communication interne, un barreur et… un rameur !
Il est demandé au rameur de rédiger un rapport d’activité tous les vingt coups de rame et une brève réunion de suivi et d’évaluation des objectifs est programmée tous les kilomètres. La course a lieu et l’équipe A termine cette fois avec trois kilomètres de retard sur l’équipe B. Le doyen et les consultants sont profondément affectés et prennent une décision rapide, mais logique et courageuse :
ils licencient le rameur, celui-ci n’ayant pas atteint ses objectifs.
Ils vendent le bateau et annulent tous les investissements prévus. Avec l’argent ainsi économisé, le doyen rénove son bureau, l’associé en charge du projet octroie une prime aux managers, superviseurs ainsi que directeurs et s’attribue une indemnité exceptionnelle de fin de mission. »