Chronique de la manifestation du 8 septembre à Bruxelles

En réponse aux révélations de l’enquête du Consortium international des journalistes d’investigation sur le lobbying déployé par la multinationale Uber de 2014 à 2016, des taxis de toute l’Europe et au-delà ont convergé vers Bruxelles pour manifester. À l’initiative des taxis bruxellois, des cortèges venus d’Espagne, d’Italie, de Suisse, de France, de Grèce, du Portugal… se sont rendus sous les fenêtres des institutions européennes. Malgré le boycott de nombreux journalistes et les tentatives pour dévoyer leur mouvement, chauffeurs et organisations professionnelles ont fait entendre la détermination partagée par la profession.

Taxis du monde
Les frontaliers s’étaient donné rendez-vous tôt le matin, les plus éloignés étaient arrivés la veille. Les uns ont pris leur voiture ou sont montés dans celle de leurs collègues, d’autres sont venus en bus ou encore en avion afin de grossir les rangs d’un mouvement dont la date de rendez-vous bousculait les impératifs de reprise des transports professionnels, scolaires et sanitaires de cette rentrée automnale 2022. Sous la houlette des véhicules à damier noir et jaune bruxellois, les voitures crème des taxis grecs arborant le blanc et bleu de leur drapeau national, l’élégance des lumineux français en provenance de Paris mais également de Lille, Nice, Versailles, Orléans, Douai, Besançon, les bicolores jaune et noir ou blancs signés de rouge des chauffeurs espagnols, la cloche et le déguisement de vache arborés par les taxis suisses ainsi que la cohorte de chauffeurs italiens venus depuis Milan, Gênes et Turin, le tout emmené par deux taxis mexicains, ont créé l’événement. Si les forces de police belges n’ont pas souhaité confirmer nos estimations, plus de 500 véhicules et un millier de chauffeurs étaient réunis. Paradant dans les rues de la capitale européenne, leur cortège a interpellé les passants surpris que leurs taxis nationaux ne soient pas seuls à souffrir et à se révolter.

Une délégation entendue
Composée de quatre représentants de la profession – Sam Bouchal, Belgique ; Julio Sanz, Espagne ; Eftimios Liberopoulos, Grèce ; Karim Asnoun, France –, une délégation désignée par les organisations professionnelles taxi a été reçue par le chef de cabinet adjoint et la conseillère politique de la commission des Transports, l’assistante en gestion des politiques à la commission Emploi et Droits sociaux ainsi que le directeur général adjoint à la direction générale de la Mobilité et des Transports. Sur les revendications portées par la profession, il a été répondu que les révélations de l’enquête Uber Files du Consortium international des journalistes d’investigation avaient motivé une enquête interne à l’initiative de la présidence de la Commission européenne, que la communication 2022/C62/01 portant sur le secteur taxi et VTC n’était ni une loi ni un projet de loi de la Commission européenne et que les États membres restaient souverains pour légiférer en la matière. Par ailleurs, un projet de directive européenne instaurant une présomption de salariat au bénéfice des travailleurs des plateformes est dans les tuyaux. Prenant acte, les membres de la délégation ont réaffirmé leur vigilance et leur volonté de solliciter à nouveau la présidence de la Commission ainsi que le commissaire européen à la Concurrence qui n’ont pas donné suite à leurs demandes d’audience.

Un tournant dans la lutte
Si, à de nombreuses reprises – et quel que soit leur pays –, les taxis ont souvent vu réduire leur révolte contre la concurrence déloyale d’Uber et de ses homologues à une velléité corporatiste, la manifestation du 8 septembre à Bruxelles a témoigné de l’universalité de la stratégie de dévoiement réglementaire poursuivie par la multinationale pour imposer son business model. Malgré leurs différences, les organisations professionnelles taxis ont affiché leur détermination et leur capacité de mobilisation et semblent avoir tissé des liens qu’elles entendent bien cultiver. « La solidarité de la famille taxi est un vrai caillou dans la chaussure d’Uber », confie l’un des organisateurs.

HM

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