9 h du matin, Paris centre. En station, les lumineux des taxis s’alignent, soulignant la perspective de la rue. Dommage que nous ne puissions pas sortir car rentrer en taxi un samedi soir se fait désormais les doigts dans le nez ! Du trottoir, notre véhicule est en approche avant même que nous ayons dégainé notre smartphone !
Le couvre-feu national à 18 h annoncé afin d’endiguer la pandémie reconfine les espoirs d’un prochain retour à la normale, d’autant que la menace d’un reconfinement brutal pèse sur les semaines à venir.
« Les touristes me manquent », témoigne un taxi parisien. « Moi, c’est les effluves de parfums des coquettes après les avoir déposées au théâtre », souligne un autre.
Dans les EPHAD, les anciens, isolés, dépriment et se laissent glisser ; les étudiants s’étiolent et les télétravailleurs ont le spleen de la machine à café. D’après les sondages, la moitié des Français ressentent mal-être, anxiété et déprime. Début octobre 2020, un rapport de l’Agence du médicament révélait déjà une hausse notable des prescriptions d’anxiolytiques.
La galette des Rois a plus été partagée en visio sur les réseaux sociaux qu’autour d’un verre de cidre ou de champagne, l’occasion d’un timide optimisme qui, comme l’expliquait le neuropsychiatre français, Boris Cyrulnik, n’a rien à voir avec la réalité mais avec l’idée que l’on se fait du réel.
S’organisant pour survivre, certains commerçants espèrent user de leurs nouveaux horaires d’ouverture pour reprendre leur souffle. Sous la neige, les viticulteurs s’entêtent à entretenir leurs vignes pour séduire le printemps. Attendant depuis plus de deux heures sa première course, le taxi en tête de file enclenche son compteur avec soulagement. S’il est sorti de son garage aujourd’hui encore, c’est pour ne pas rater l’occasion de « choper la chance ! ».
Hélène Manceron
Photo de couverture réalisée par ©DoYouSpeakTaxi