Alors que le confinement a paralysé l’activité des taxis, l’inertie du trafic aérien et l’absence de tourisme entravent la reprise. Dans les territoires d’Outre-mer, la situation continue de creuser le chiffre d’affaires des chauffeurs et risque d’accentuer les tensions que génère la non-application des lois régissant le secteur. Tour d’horizon.
Taxis de Guadeloupe
« La situation économique des taxis de Guadeloupe est difficile car peu de touristes sont venus à cause du contexte sanitaire. Seuls les chauffeurs conventionnés parviennent aujourd’hui à sortir la tête de l’eau grâce à la reprise des transports médicaux », explique Jocelyn Bourgarel, président de l’UNT Guadeloupe. Mais si le contexte pandémique pèse toujours sur l’archipel des Caraïbes, la précarité réglementaire reste une préoccupation forte. « L’arrêté actuellement en vigueur a calmé la révolte des taxis mais ce n’est toujours pas l’application de la réglementation. Les Loti poursuivent leur concurrence déloyale. Pour rentrer dans le port, les VTC et les Loti doivent désormais disposer d’une réservation… mais ces réservations sont en réalité des commandes immédiates, provenant de bornes dédiées installées à la sortie des bateaux et prescrites par des hôtesses aux passagers désireux de faire escale ! Nous attendons beaucoup de la mission d’information parlementaire conduite en mars dernier par le député Bruno Millienne car l’Outre-mer est effectivement un cas particulier et ces territoires ne peuvent être réduits aux souvenirs de vacances des décideurs ! »Taxis de Guyane
Après un confinement qui aura duré près de six mois, les taxis de l’enclave française en Amérique du Sud restent en situation critique. « Le confinement a été plus long qu’en métropole et nous sommes toujours en zone rouge. L’activité a repris a minima depuis août grâce aux transports conventionnés par l’Assurance maladie mais le contexte économique aiguise les rivalités », explique Émile Leneus, président de l’UNT Guyane. « Pour des raisons diverses, la majorité des chauffeurs n’a pas sollicité le fonds de solidarité. Nous nous sommes alors adressés à la chambre de métiers et de l’artisanat et demandé la mise en place d’une subvention pour l’achat des équipements sanitaires ainsi qu’une exonération partielle ou totale des charges fiscales et sociales », complète-t-il. En outre, les quelque 200 taxis guyanais font face à une multitude de transporteurs clandestins qui minent l’activité. « Malgré nos démarches, la commission T3P n’est toujours pas en place. Cette instance permettrait de réguler un secteur à qui, aujourd’hui, seule la CPAM impose ses exigences. »
Taxis de Saint-Martin
« La situation est morose car à peine sortis des séquelles de l’ouragan Irma qui a dévasté la région en 2017, nous subissons la pandémie. Peu de taxiteurs sont conventionnés et nous dépendons quasi totalement du tourisme », décrit Raymond Helligar, conseiller technique de l’association Swalicab des taxis de Saint-Martin. « Nous avons été obligés de nous mobiliser en juin dernier car de nombreux chauffeurs ne pouvaient bénéficier du fonds de solidarité mis en place par l’État au motif notamment de paiements incomplets des charges sociales et fiscales », explique-t-il. Consciente de la situation particulière de ce territoire victime de l’ouragan Irma, de la grève de deux mois de la Caisse territoriale des œuvres scolaires ainsi que des tensions sociales provoquées par le plan de prévention des risques naturels en décembre 2019, la préfecture a apporté son soutien à la profession afin d’éviter le naufrage mais les chauffeurs restent en attente des aides annoncées.
Taxis de la Réunion
« Comme nos collègues d’Outre-mer et de métropole, le confinement a été une période difficile car nous avons perdu entre 80 et 90 % de chiffre d’affaires. L’activité des taxis conventionnés a repris mais les taxis d’aéroport sont toujours très impactés. La saison touristique qui dure d’avril à octobre a été dévastée et il nous faudra attendre l’année prochaine afin de retrouver les croisiéristes. Les aides ont été salvatrices. La commission T3P veille à la bonne application de la réglementation et un contrôle étroit – parfois un peu excessif – est exercé sur les transporteurs », explique Stevens Hoareau, président de l’UNT Réunion. Par ailleurs, le territoire semble rencontrer moins de problèmes que ses homologues ultramarins : « Nous bénéficions d’une bonne solidarité entre organisations professionnelles taxi comme VTC. Nous partageons l’information et ne laissons rien dans le flou », complète le représentant syndical. « Nou tien bon nou larg pas !* » conclut-il.
Propos recueillis par Hm
*« Tenons bon, ne lâchons rien ! »