100% Edito : Taxi médical… et plus

Cela fait déjà un moment que je me languis dans la salle d’attente de l’hôpital, à observer le ballet incessant des blouses bleues, blanches et roses. Autour de moi, une jeune maman dessine avec son enfant, un œil sur l’œuvre de sa progéniture, l’autre guettant l’appel en consultation ; un grand-père semble endormi sur sa canne, à moins qu’il médite… Une infirmière vient asseoir une femme âgée à côté de moi et lui demande de patienter le temps de préparer sa sortie. Fébrile et agitée, la dame fait tomber une pochette que je ramasse. « À chaque fois que je viens, je suis anxieuse », dit-elle en me remerciant. « J’ai peur d’oublier ce que le médecin a dit ou de ne pas avoir compris. J’ai peur de perdre mes affaires, mes papiers ou les médicaments. »
Réalisant une enquête BVA en 2016, le site Hospitalidée, sorte de Tripadvisor de la santé, révèle que
« 30 % des gens qui ne se sentent pas en sécurité pendant leur hospitalisation ne jugent pas le personnel médical, ni leurs compétences, mais l’organisation de l’établissement, qui ne s’adapte pas aux besoins des patients. Ce sont des personnes accueillies de façon très administrative qui ont peur d’être oubliées, à qui on n’explique pas les soins ou les symptômes, ni ce qui se passera pour elles après l’opération ». Pour les malades suivis en ambulatoire, mesure phare de la politique de réduction budgétaire de l’Assurance maladie, ce sentiment d’insécurité grimpe jusqu’à 76 % !
Vérifiant une énième fois ses affaires, ma voisine reprend : « Stéphane va venir me chercher. » « Ça doit vous rassurer que votre fils arrive. » « Stéphane n’est pas mon fils, c’est mon taxi », me répond-elle. Sans que nous ayons remarqué son entrée, Stéphane est là. À sa vue, le corps de ma voisine s’apaise d’un coup. « Bonjour Madame Michelle », lui adresse Stéphane en lui proposant son bras. « Venez, nous allons d’abord passer au secrétariat récupérer vos papiers. » « Et s’il y a des médicaments à acheter ? » s’inquiète la vieille dame. « Pas de souci, nous ferons comme d’habitude. Je me débrouillerai pour vous les apporter. » Stéphane me salue d’un signe de tête, tandis qu’elle m’a déjà oubliée. Ensemble, ils se dirigent vers la sortie, ma voisine accrochée au bras de Stéphane comme à une bouée de sauvetage.

Hélène Manceron

Feuilleter l’édition n°269 de 100% NEWS TAXIS

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