Alors que le nombre d’inscrits dans le cadre de l’action collective contre Uber ne cesse d’augmenter, certains chauffeurs de taxis restent frileux. Ils craignent un énième coup d’épée dans l’eau, une énième déception face au géant californien que rien ni personne ne semble pouvoir arrêter. Pourquoi cette action aboutirait-elle alors que toutes les autres ont échoué ? En quoi ce grand mouvement est-il inédit ? Autant d’interrogations auxquelles les membres d’Action taxi tentent de répondre jour après jour sur les réseaux sociaux. Accompagné par le cabinet d’avocats Bruzzo Dubucq, le collectif l’assure : l’initiative s’inscrit dans un cadre juridique nouveau. Plusieurs décisions de justice récentes penchent en faveur des taxis. Des professeurs de droit renommés ainsi que des économistes le confirment : Uber bafoue le droit du travail. Il existe un acte de concurrence déloyale clair et évident si bien que les taxis ont toute légitimité pour demander réparation du préjudice qu’ils subissent depuis l’installation de Uber en France.
Interview de Tristan Girard-Gaymard, directeur scientifique de l’Action
La justice considère-t-elle que Uber est en faute ?
« Sur ce point, la jurisprudence évolue. Depuis le 4 mars 2020, la Cour de cassation reconnaît que le lien qui existe entre Uber et les chauffeurs est un lien de salariat. Depuis l’origine, la société aurait ainsi dû assurer ses obligations en tant qu’employeur et respecter le code du travail. Ce n’est pas le cas. Uber commet donc une faute, selon la Cour. »
Comment prouver qu’il existe une concurrence déloyale et que celle-ci cause du tort aux taxis ?
« Uber viole le droit du travail et profite de sa faute pour gagner des parts de marché. Le non-respect de la loi est constitutif d’un acte de concurrence déloyale. Dans une telle situation, le préjudice est présumé. Il existe de façon automatique. Tous les préjudices sont donc réparables, à commencer par le préjudice moral. Il existe également un préjudice d’anxiété. Se lever chaque matin sans savoir quel sera l’avenir de sa profession est un vrai préjudice. Il y a bien sûr des préjudices indemnisables sur le plan économique et financier. Ceux-ci sont caractérisés par une perte notable de chiffres d’affaires. »
Quelles sont les nouvelles règles en matière de concurrence déloyale ?
« Depuis le mois de février dernier, la Cour de cassation estime que les victimes d’un acte de concurrence déloyale peuvent placer leur argumentaire sur le terrain des profits illicites. Uber, en violant le droit du travail, a réalisé des centaines de millions d’euros d’économie. Le préjudice subi par les taxis sera donc évalué au regard de cette économie. Ce raisonnement juridique est nouveau. Il pousse en faveur d’une sanction très lourde pour Uber. »
Propos recueillis par Capucine Coquand
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