« Là où il y a une volonté politique, il y a un chemin » – Laurent Grandguillaume

N ommé en 2016 médiateur dans le conflit qui opposait déjà taxis, VTC et plateformes numériques, rapporteur de la loi du 29 décembre de la même année, Laurent Grandguillaume n’est plus à présenter. Travaillant à pacifier le secteur en conciliant révolution technologique et protection des personnes tant chauffeurs que passagers, il a été sollicité par le Premier ministre, François Bayrou, afin de résoudre la crise que traversent actuellement les chauffeurs de taxi. Il partage avec nous son expertise.

Laurent Grandguillaume, rapporteur de la loi de 2016 relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes

« Depuis plusieurs jours, les taxis sont très mobilisés dans plusieurs villes de France pour exprimer leur colère en raison des mesures prises sur le transport sanitaire. Il n’y a pas eu un tel mouvement depuis près d’une décennie. S’il est nécessaire de maîtriser les budgets dans un contexte de crise budgétaire, les taxis ont exprimé cette colère pour plusieurs raisons :

  • Les taxis exercent une mission de service public dans tous les territoires (urbains, périurbains, ruraux) – c’est le seul moyen de transport disponible partout dans un contexte de désertification médicale. Les expressions qui stigmatisent les chauffeurs sont vécues comme du mépris vis-à-vis de leur métier et du service qu’ils apportent. Trop souvent, les responsables politiques décrivent le modèle du taxi comme un modèle ancien alors qu’il a toujours évolué avec les transformations de la société.
  • Les différentes dispositions législatives qui ont pu redonner à l’État les moyens de garantir une concurrence équitable entre taxis et VTC ne sont pas toujours appliquées dans l’exhaustivité, ce qui est vécu comme une injustice. Les chauffeurs demandent finalement le respect de l’État de droit.
  • Avec les JO, des milliers de VTC sont arrivés sur le marché en plus de ceux existants ce qui a déséquilibré un modèle fragile dans le contexte économique actuel qui est tendu.

Suite à mon rôle de médiateur en 2016, j’ai été contacté par le Premier ministre, François Bayrou, pour un échange. J’ai tout d’abord préconisé qu’il est n’est pas nécessaire de faire appel à nouveau à un médiateur car nous ne sommes pas dans le même contexte. En 2016, c’est le contournement de la loi Loti qui a créé les conditions d’un conflit. Cette fois-ci c’est une mesure d’ordre public sur laquelle le gouvernement a la main. C’est donc beaucoup plus simple car là où il y a une volonté politique, il y a un chemin. Je n’ai jamais eu d’échanges auparavant avec le Premier ministre, j’ai trouvé qu’il est à l’écoute et soucieux de résoudre cette situation tant pour les taxis que pour les finances publiques. Il y a donc des solutions possibles.
Pour résoudre le conflit, il y a à mon sens, et j’ai eu l’occasion de le partager, deux actions à mener :

  • Suspendre la réforme et créer les conditions d’une réforme qui conduise à des économies pour une gestion saine et rigoureuse, mais qui garantisse aussi la mission de service public dans tout le territoire avec humanité pour les personnes qui ont besoin de soins,
  • Renforcer les contrôles et faire évoluer la législation en lien avec les nouvelles pratiques de concurrence déloyale subies par les chauffeurs. Cela pourrait passer par une régulation par les métropoles comme le fait la TLC à New York depuis plus d’une décennie.

J’appelle bien entendu chacun au dialogue et à la sortie de crise par l’action. Cela prendra nécessairement du temps. Je souhaite une sortie de crise positive. »
L. Granguillaume
Plus d’infos : Grandguillaume.net

Comment ça se passe à New York ?
À New York, le secteur du transport public particulier de personnes – T3P – est étroitement régulé par une commission municipale, la NYC Taxi & Limousine Commission – NYC TLC. Elle a la charge de la délivrance des licences, de la réglementation et du contrôle du secteur. Pour exercer, tous les conducteurs – que ce soit d’un taxi jaune, d’un taxi vert, d’une limousine… – doivent se soumettre à une vérification de leurs antécédents, justifier de leur capacité de conduite et suivre une formation. Les véhicules sont régulièrement inspectés pour vérifier leur sécurité et leurs émissions. Les loueurs de véhicules quels qu’ils soient doivent être agréés et toutes les plateformes de mise en relation doivent posséder une licence d’exploitation délivrée par la NYC TLC. Lyft et Uber, par exemple, disposent d’une licence valable 2 ans dont le renouvellement est étudié par la commission.

©Gilmic

Qui a le droit de quoi ?
Les taxis jaunes : Véhicules emblématiques de la ville, les 13 587 taxis jaunes sont autorisés à prendre en charge les passagers soit en maraude, soit sur réservation partout dans la ville.
Les véhicules de location (FHV) : Les conducteurs de ces véhicules loués auprès de garages agréés par la NYC TLC sont accessibles uniquement sur réservation.
Les taxis verts : Les conducteurs louent leurs véhicules auprès d’un garage agréé. Ils peuvent marauder sauf dans une zone strictement définie (du sud de la 110e Rue Ouest jusqu’à la 96e Rue Est) exclusivement réservée à la maraude des taxis jaunes.
Les limousines : Comme les grandes remises en France, ces véhicules sont dédiés aux transports de luxe, uniquement sur réservation.
À ces acteurs s’ajoutent les fourgonnettes de transport collectifs (de 9 à 20 passagers), les véhicules TPMR pour le transport non urgent de personnes handicapées ainsi que ceux du programme pilote SHL (à l’étude jusqu’en juin 2026) qui disposent des mêmes prérogatives que les taxis verts mais ne peuvent pas accepter d’être réservés lorsqu’ils sont dans la rue. Cette flotte est expérimentée pour améliorer le transport médical non urgent pré-organisé et la desserte de la périphérie de la ville. Les véhicules doivent être électriques et accessibles aux fauteuils roulants.

Plus d’infos : NYC Taxi & Limousine Commission
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