Édito : Taxis, sentinelles de notre société

Aux abords du boulevard Raspail, mon chauffeur se met à jouer du klaxon. Face à ma surprise, il se
justifie : « Notre profession manifeste depuis lundi. J’ai rejoint le rassemblement hier. Je retournerai auprès des collègues demain mais aujourd’hui, je suis allé travailler. J’ai des traites à payer, je dois penser à ma famille et notre combat s’annonce comme un marathon », m’explique-t-il.
Depuis le 19 mai dernier, les taxis se mobilisent contre le modèle de tarification imposé par l’Assurance maladie pour le transport de malades ainsi que contre la concurrence déloyale des plateformes de VTC. « Des revendications corporatistes qui ne font qu’entraver la circulation », critiquent certains dont la démagogie n’a d’équivalent que celle des chroniqueurs qui nous font croire que pour les générations futures, il est plus important de ne plus fumer sur les plages plutôt que d’épargner banlieues et centres urbains des gaz à effet de serre dus à la circulation automobile !
Les caisses de l’Assurance maladie sont vides et ne peuvent plus financer le transport des malades éloignés des centres de santé regroupés en pôle régionaux, obligés par la politique d’hospitalisation de jour de rentrer chez eux après chaque soin.
Pourtant sur les 3 milliards d’euros dépensés en 2024 pour le transport en taxi conventionné, l’État a récupéré a minima 1,615 milliard d’euros en TVA, cotisations sociales et impôts sur leurs entreprises. Parallèlement, l’impunité dont bénéficient les plateformes numériques représente un profond manque à gagner. « Si tous ces travailleurs de plateformes – nous avons évalué leur nombre à 300 000 – au contestable statut d’indépendants étaient requalifiés en salariés et rémunérés au SMIC, leurs cotisations abonderaient nos systèmes de solidarité nationale de 1,45 milliard d’euros par an », estime une enquête de L’Humanité. Le scandale des Uber files a révélé l’optimisation fiscale pratiquée brillamment par la multinationale et ses homologues. Sans parler de la nouvelle combine des « sociétés de rattachement » basées hors de France et qui permettent à leurs chauffeurs d’échapper aux contributions qui financent la solidarité nationale.
« À la recherche d’économies rapides, le gouvernement cible les plus vulnérables : retraités, personnes âgées, handicapés… et désormais les chauffeurs de taxi, accusés d’abuser du système de transport sanitaire. Une offensive qui suit une stratégie bien rodée : pointer des boucs émissaires peu menaçants et présenter la mesure comme une correction de justice sociale », explique Marc Guyot, professeur à l’Essec.
Les taxis ne se laisseront pas faire et c’est tant mieux pour nous !
Hélène Manceron

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