Après avoir réussi tant bien que mal à hisser mes valises dans l’escalator en panne, le sourire du chauffeur qui m’attend devant la gare adoucit les périples du voyage. Installée confortablement dans son taxi, je me laisse aller au rituel de nos questions-réponses. « Toujours content de votre voiture électrique ? » Il fait la moue : « Je commence à en revenir petit à petit, d’autant qu’avec l’abandon des ZFE, l’urgence n’est plus là. »
Initiées en 2019 et étendues en 2021 par la loi Climat et Résilience, les Zones à Faibles Émissions visent, par l’exclusion de certains véhicules en fonction des fameuses vignettes Crit’Air, à améliorer la qualité de l’air en limitant les rejets de particules fines responsables de maladies respiratoires et de 40 000 décès par an selon Santé publique France. Bien que décriée, leur mise en œuvre s’est déployée depuis le 1er janvier 2025 dans toutes les villes de plus de 150 000 habitants. Le 26 mars dernier, une commission spéciale de l’Assemblée nationale a pourtant voté leur suppression partout en France. Si l’hémicycle ne s’est pas encore prononcé quant à la condamnation de la mesure, le gouvernement, en revanche, est mobilisé pour son sursis. Les gaz d’échappement, nocifs pour l’environnement comme pour la santé, pourraient également nuire aux finances publiques. Alors que le Premier ministre poursuit la performance d’équilibriste de son prédécesseur pour trouver 40 milliards d’euros d’économies pour 2026, l’abandon des ZFE pourrait coûter à la France le remboursement de 3 milliards d’euros d’aides européennes prévient la Direction générale du Trésor. Nos voisins européens ne nous ont pas attendus : en Italie, les ZFE existent depuis les années 70 ; les Pays-Bas ont mis en place une ZFE portuaire et s’orientent vers des zones à zéro émission pour la logistique ; au Royaume-Uni, pourtant sortie de la Communauté européenne, Londres a ouvert la voie à des « zones d’air pur » dans l’ensemble du pays ; en Allemagne, des « zones environnementales » existent depuis 2010 et plusieurs villes engagent une nouvelle étape plus contraignante ; enfin, en Espagne, la réussite des ZFE de Madrid et Barcelone a conduit le gouvernement à prévoir leur mise en place dans les villes de plus de 50 000 habitants.
Une nouvelle exception française qui va augmenter la pression sur le Comité d’alerte sur le budget parti en chasse aux économies, tels des enfants lâchés dans le jardin pour la récolte des œufs en chocolat.
Hélène Manceron








