Edito : SUV qui peut !

« Mais il va me rentrer dedans avec son pare-buffle ! » tonne soudain mon taxi, ponctuant son exclamation d’un coup de klaxon. Surprise, je lève les yeux de mon smartphone pour chercher le danger. Nous sommes à l’arrêt et les véhicules devant nous englués dans les embouteillages du soir. Suivant le regard furibond de mon chauffeur dans le rétroviseur intérieur, je me retourne et aperçois, en hauteur, le conducteur qui nous succède répondre par des gestes de dédain. « Avec leurs 4×4 du dimanche, ils regardent le feu et oublient qu’ils ne sont pas seuls sur la route. »
Dominant le marché européen des véhicules neufs depuis 5 ans et représentant plus de 50 % des ventes de voitures, les SUV – Sport Utility Vehicle – sont au cœur de controverses. Plus long, plus larges, plus hauts et surtout plus lourds qu’une berline, un break ou une citadine, les SUV sont avant tout les cancres de la sobriété énergétique et de la sécurité routière. « Si les SUV étaient un pays, celui-ci se classerait 6e plus gros pollueur du monde », soulignent les experts. D’autant qu’ils consomment 20 % de carburant en plus et sont gourmands en lithium, cobalt et nickel pour la réalisation de leurs grosses batteries. Mais leur nocivité ne serait pas qu’écologique. Selon l’enquête menée par l’assureur Axa, ces Gargantuas de la route provoqueraient jusqu’à 25 % d’accidents en plus que les autres véhicules de tourisme avec des dommages majoritairement plus graves pour les victimes. La faute à un centre de gravité déplacé en hauteur qui ne permettrait pas aux pare-chocs d’amortir les collisions.
Plus chers, plus difficiles à stationner en milieu urbain, très peu utilisés pour leurs capacités tout-terrain, les SUV répondraient à une mode cultivée par les constructeurs. « Le SUV s’inscrit dans une logique de distinction », explique le sociologue Yoann Demoli. « Conduire un SUV est une forme de position dans l’espace social. »
Désireuse d’encourager l’usage de véhicules plus petits ou à faibles émissions, la municipalité lyonnaise appliquera dès 2024 une tarification de stationnement différenciée : 15 €/mois pour un véhicule électrique et 45 €/mois pour les SUV. À Paris, la ville organisera le 4 février prochain une votation sur la place des SUV dans la capitale. D’ores et déjà, elle prévient que les taxis dans les stations dédiées ne seront pas concernés par d’éventuelles sanctions. J’en connais au moins un à qui ça va faire plaisir !

Hélène Manceron

Plus d’info : « Plus ou moins de SUV ? » – Accéder au site de la Mairie de Paris

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