Justice : Action taxi, enfin le dénouement ?

Déjà trois ans depuis que le collectif Action taxi s’est constitué pour dénoncer les pratiques illicites utilisées par Uber pour s’implanter en France et les préjudices financiers et moraux subis par les chauffeurs de taxi. Si le temps judiciaire peut paraître long et pesant, le 13 octobre prochain, la 15e chambre du tribunal de commerce de Paris se réunira enfin en audience. Après les révélations des Uber Files et la constitution d’une commission d’enquête parlementaire qui a rendu ses préconisations en juillet dernier, la demande de réparation de la profession sera-t-elle entendue ?

Pot de terre contre pot de fer
Réunissant près de 8 % des chauffeurs hexagonaux et 9 associations professionnelles représentés par le cabinet d’avocats Bruzzo Dubucq, l’audience de la 15e chambre du tribunal de commerce de Paris, le 13 octobre prochain, s’annonce comme déterminante. Déjà, de nombreux demandeurs ont prévu d’assister aux débats. Après plus de 13 ans d’impunité et de soutiens politiques comme financiers, la multinationale sera-t-elle enfin sanctionnée pour ses méthodes illicites ? La décision est de poids car elle aura une portée qui dépasse les intérêts directs des plaignants. Elle pourrait en effet par la suite servir de précédent favorable et ouvrir des droits à indemnisation à l’ensemble de la profession.
Un modèle disqualifié
« Sur le volet du droit, Uber a violé la loi. Il a raconté une fable l’affranchissant de ses responsabilités d’entreprise de transport », rappelle un collaborateur du dossier. Une irresponsabilité assumée avec impunité par la multinationale malgré sa condamnation par la Cour de justice de l’Union européenne depuis le 20 janvier 2017. « De plus, par deux fois la Cour de cassation a jugé qu’Uber doit salarier ses chauffeurs », complète notre informateur. Enfonçant le clou, le scandale des Uber Files a apporté son lot de preuves confirmant les alertes lancées par les chauffeurs de taxi lors de leurs nombreuses manifestations et leurs contributions aux médiations Thévenoud comme Grandguillaume. Les conclusions de la commission d’enquête parlementaire ont beau être claires, elles sont uniquement porteuses de bonnes intentions, mais le jugement pourrait contribuer à rétablir la crédibilité de la puissance publique et réaffirmer l’état de droit face à l’un des pirates du numérique !

Tribunal de Commerce, Paris 4e ©Actiontaxi

Obtenir réparation
S’appuyant notamment sur l’étude de plus de 10 000 bilans comptables, les plaignants présenteront des données objectives. L’ambition des avocats du collectif est une réparation financière estimée à 455 938 634 € pour les préjudices ainsi qu’une astreinte journalière de 1 700 000 € tant qu’Uber n’aura pas régularisé la situation de ses chauffeurs par leur salarisation et leur déclaration à l’Urssaf. Un bénéfice collatéral pour les VTC dont la précarisation est désormais de notoriété publique, sans parler de l’opportunité offerte à l’État français, également victime de la fraude sociale et fiscale de la plateforme qui, pour 100 euros facturés en France, via sa filiale des Pays-Bas, ne paie que 12 centimes d’impôts et cotisations sociales ! Espérons que la 15e chambre du tribunal de commerce de Paris – dont les magistrats ont été récemment renouvelés en conséquence du conflit d’intérêts dévoilé par le magazine Marianne en janvier dernier – sifflera le hors-jeu et distribuera les pénalités à l’encontre de l’un des rapaces les plus emblématiques de « l’économie des petits boulots ! »

HM

Feuilleter 100% NEWS TAXIS n°259

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.