En avance sur mon rendez-vous, je me rafraîchis à l’ombre de la terrasse du café de la gare. Un « Vous vous intéressez aux taxis ? » vient troubler ma quiétude. La photo de lumineux et la mention 100% Taxis de la couverture du journal posé devant moi a invité mon interlocuteur à m’aborder. « J’étais taxi », enchaîne-t-il avant même que j’ai pu lui dire bonjour. « Je suis en retraite maintenant mais j’ai fait le métier pendant plus de 30 ans ! » Je l’invite à s’asseoir. « C’est un métier passionnant. J’ai vendu ma licence mais je l’ai encore dans la peau. Alors, je suis devenu VTC. Pas à plein temps, juste le matin. J’ai rappelé les clients que je préférais. Ça m’occupe et rajoute du beurre dans les épinards. » Étonnée, je l’interroge : « Qu’en dit votre repreneur ? » « Oh, il a fait la gueule mais ça le forcera à fidéliser sa clientèle… »
« Ok boomer ! » avait taclé une députée écologiste néo-zélandaise de 25 ans un collègue masculin plus âgé qui venait de la huer pendant son discours sur l’urgence de la lutte contre le réchauffement climatique. Depuis, le concept de boomer s’est installé et a même été repris sur des pancartes lors des manifestations contre la réforme des retraites. Désignant les individus nés lors du baby-boom entre la fin de la Seconde Guerre mondiale et le début des années 1960, il les oppose aux millennials, générations Y et Z, nés à partir des années 80. Ce n’est pas tant leur âge qui serait reproché aux boomers mais leur place dans l’histoire sociale. « Si l’on compare ces générations, il est certain qu’il y a beaucoup d’inégalités, de déclassement pour les jeunes d’aujourd’hui », constate Camille Peugny professeur de sociologie à l’université de Versailles-Saint-Quentin. « Les baby-boomers ont eu, globalement, une vie bien plus facile. Certes, les conflits entre générations ont toujours existé. Mais si, avant, ils se manifestaient surtout sur le plan des valeurs sociétales, désormais, le contexte socio-économique les a exacerbés. » Aux commandes de l’économie, en politique et dans les médias, confrontée à la longévité de ses parents, cette génération redoute l’entrée dans le quatrième âge et une dépendance solitaire qui semble inéluctable.
Mon rendez-vous arrive. Je me lève pour prendre congé de mon interlocuteur et accueillir mon invité. Lui aussi est en retraite, lui aussi a vendu son taxi et lui aussi garde une passion pour son métier, mais différente… « Vous savez l’âge est là mais mes interventions au centre de formation me dopent », répond-il à mon « comment allez-vous ? » « J’aime accompagner les futurs taxis dans leurs projets. Leurs espoirs et leur volonté devraient être remboursés par la sécurité sociale ! »
On en revient toujours à Brassens, « le temps ne fait rien à l’affaire, qu’on ait vingt ans qu’on soit grand-père, quand on est c… on est c… »
HM
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