Il m’a vue ! Après mon signe de la main, mon futur taxi s’est arrêté de l’autre côté du passage piéton. J’attends avec impatience que le petit bonhomme passe au vert. À ma droite, un enfant piaffe sur sa trottinette, retenu par sa mère ; à ma gauche, un couple âgé attend sagement son tour. Lorsqu’enfin, nous sommes autorisés à traverser, stop ! Un cycliste nous coupe la route à grands coups de sonnette péremptoires sans même ralentir… Nous nous regardons, interdits.
Installée dans le taxi, je rage de ma mésaventure. « Ne vous formalisez pas, Madame, pour certains cyclistes, la circulation est une corrida », soupire mon chauffeur. « Tous les coups sont permis ! Pour nous les taxis, c’est une grande source de stress car en cas d’accident, quel que soit le motif, nous serons toujours considérés comme responsables. »
Alors qu’une altercation entre un cycliste et un chauffeur de taxi arbitrée par la députée Sandrine Rousseau – passagère du taxi – fait le buzz sur les réseaux sociaux, les relations entre ces deux alternatives à la voiture individuelle semblent plutôt tendues.
Professeur de psychologie, Tom Stafford livre son analyse sur la difficile cohabitation entre cyclistes et automobilistes : « La route a ses règles, écrites ou non écrites, et il existe de bons et de mauvais conducteurs. Toute la danse complexe du carrefour aux heures de pointe ne fonctionne que parce que les gens connaissent les règles et dans l’ensemble les suivent : rester dans sa voie ; mettre son clignotant ; à elle d’abord, maintenant à mon tour, maintenant à toi. Viennent ensuite les cyclistes, qui suivent innocemment ce qu’ils croient être les règles de la circulation, mais font des choses que les conducteurs n’ont pas le droit de faire : remonter les files de voitures, se déplacer bien en dessous de la limite de vitesse ou doubler à droite. Comme la vie en société, la conduite est un jeu de coordination où nous devons nous faire confiance les uns les autres pour nous comporter comme il faut. »
Alors que je m’apprête à sortir, mon chauffeur m’avertit de faire attention aux cyclistes avant d’ouvrir ma portière. « C’est la source d’accidents la plus fréquente. Je le sais d’autant mieux que le week-end, je participe à des sorties à vélo avec des copains. »

Hélène Manceron

Feuilleter 100% NEWS TAXIS n°252